Ahcène Larbi Benameur, connu sous le nom de Cheikh H’cicène est né en 1920 à La Casbah d’Alger. Ses parents sont originaires de Maâtkas dans la wilaya de Tizi-Ouzou. Ce père de 3 enfants, est mort en 1959 à l’hôpital Saddikia, à Tunis à l’âge de 39 ans des suites d’une maladie des poumons.
L’artiste faisait partie de la troupe artistique du FLN que dirigeait à l’époque Mustapha Kateb. De l’avis de ceux qui l’ont connu et côtoyé H’cicène était un homme très humble et toujours de bonne humeur. Inhumé au cimetière El-Djeledj, au plus fort de la guerre de Libération, son souvenir s’est presque perdu depuis. Et comme on dit un être est vraiment mort que si son souvenir est éteint. L’homme, avant de mourir, rentrait d’une tournée avec la troupe artistique du FLN qui l’avait mené dans différents pays amis de l’Algérie. Mais avant de venir à Tunis l’homme déjà capitalisait une intense activité militante et politique au sein du Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques (MTLD) dont il était le chantre et au compte duquel il avait mené des activités de propagande dans toute l’Algérie. Il dut cependant abandonner son activisme en Algérie dès le déclenchement de la bataille d’Alger. Sentant l’étau se resserrer autour de lui, il émigra en France où il retrouve beaucoup de ses amis qui ont quitté le pays pour les mêmes raisons. Il entre en contact avec Amraoui Missoum, virtuose de la musique algéro-orientale, auprès duquel il perfectionna son art. Doté d’une mémoire prodigieuse, l’artiste avait la capacité phénoménale de retenir de longs poèmes qu’il n’avait lues en fait qu’une seule ou deux fois. Fin interprète, il chantait de grandes qacidates avec une intonation qui lui était propre, tout en faisant l’économie, à l’opposé des autres artistes, de s’en référer aux textes qu’ils avaient transcrits au préalable. Enfant, jouant à l’animateur du quartier, il avait pris plaisir à jouer en dilettante de la mandoline, de la guitare et de la mandole, Son talent vite s’affirma dans les faubourgs d’Alger et bientôt H’cicène se retrouvera intégré aux ensembles des grands maîtres du chaâbi. Il y apprend vite les rudiments classiques aidé en cela par son appréhension instinctive de la prosodie. A la veille du 1er Novembre, sa renommée était déjà bien établie. De son compagnonnage avec Missoum, il nous revient avec l’unique enregistrement de sa carrière. Ses œuvres, chantées dans les deux langues, kabyle et arabe, sont sorties de chez la maison Pacific. C’est l’époque où l’on fredonnait partout ses sublimes chansons commet Youm el djemaâ rah ttiri, Allah iletha bihoum, Refdhagh Tavalizth et la fameuse Ttir el qafs. Au cabaret parisien « Le Maroc », il avait donné une série de soirées qu’il animait en compagnie seulement d’un batteur jusqu’à ce les autres musiciens algériens se joignent à lui tard dans la nuit, uniquement pour le plaisir. H’cicène en profita pour réaliser les enregistrements de la série des « Soirées avec H’cicène ». S’il a inspiré nombre d’artistes algériens à l’image de Djamel Allam et du cheikh El Hachemi Guerrouabi, H’cicène n’en demeure pas moins aujourd’hui un inconnu pour la jeune génération d’Algériens. Dans une contribution à El Watan sous le titre Qui se souvient de H’cicène, Lounès Aït Aoudia qui n’est autre que le président de l’association des amis de la rampe Louni Arezki, affirme que les jeunes de 18 à 40 ans « ont spontanément et tristement révélé (selon un sondage qu’il avait mené )une méconnaissance absolue de ce référent culturel et de sa symbolique (H’cicène) dans l’univers de la chanson chaâbie ». Et de poursuive « Il est ainsi et encore démontré par la résultante de l’approche, que cette catégorie, qui, faut-il le rappeler, constitue la majorité de la société algérienne se trouve déplorablement dépourvue de mémoire collective et de repères culturels ».