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Le salon de beauté de Julie, véritable oasis dans un camp haïtien
6 Juin 2010

Cela fait presque cinq mois que la coiffeuse de 26 ans a perdu sa maison et son salon de beauté après le tremblement de terre du 12 janvier dernier. Dans le camp où elle loge, situé sur un ancien terrain de golf huppé de Pétion-Ville dans la banlieue de Port-au-Prince, elle a relancé son petit salon de beauté, désormais situé sous une bâche exiguë partagée avec les membres de sa famille. Rien de comparable avec son florissant salon d’autrefois.

Dans son petit salon improvisé au beau milieu d’un camp de fortune haïtien, Julie Colin enroule doucement d’un foulard les bigoudis de sa cliente afin de les protéger de l’épais nuage de poussière ambiant. Cela fait presque cinq mois que la coiffeuse de 26 ans a perdu sa maison et son salon de beauté après le tremblement de terre du 12 janvier dernier qui a fait des centaines de milliers de morts et laissé la capitale Port-au-Prince dévastée. Et à la vue de la trop lente avancée des travaux de reconstruction, des gravats qui jonchent encore les rues et des millions de sans-abris qui tentent péniblement de survivre dans une des 1.300 tentes mises à disposition, la frustration gagne de plus en plus d’Haïtiens et de donateurs internationaux. Mais Julie, elle, est déterminée à renouer avec sa vie d’avant. Dans le camp où elle loge, situé sur un ancien terrain de golf huppé de Pétion-Ville dans la banlieue de Port-au-Prince, elle a relancé son petit salon de beauté, désormais situé sous une bâche exiguë partagée avec les membres de sa famille. Rien de comparable avec son florissant salon d’autrefois, en briques et à l’allure moderne. "Oh, c’était très chic", regrette-t-elle en soupirant devant le sol poussiéreux, recouvert d’une bâche de plastique bleu. Dès l’arrivée des premières gouttes de pluie, le sentier escarpé qui mène au pas de la porte devient boueux et ressemble alors à une tranchée. "Ce n’était pas comme ça. Il y avait tout dans mon salon", dit-elle avec une pointe de nostalgie dans la voix. "J’arrive à travailler ici mais il me manque beaucoup de choses. Comme des sèche-cheveux, par exemple. Et je n’ai pas non plus d’électricité". Toutes les prestations sont à moitié prix en ce moment car Julie sait bien que tout le monde est à court d’argent. Les manucures et pédicures coûtent moins de trois dollars. Un shampooing et un brushing vous coûteront 10 dollars et il faut compter 4,20 dollars pour des extensions de cheveux. Les nouvelles clientes aussi bien que les habituées s’enthousiasment de pouvoir se faire pomponner. D’après Julie, six de ses clientes les plus fidèles font jusqu’à trois changements de bus avant d’atteindre cette minuscule oasis, située à des kilomètres de leurs maisons. D’autres, comme Katiana Mugascin, vivent dans le camp et se pressent chaque semaine aux portes du salon pour leur rituel tant attendu et qui leur fait du bien. En contemplant ses sourcils fraîchement épilés, Katiana affirme que non, elle ne se sent vraiment pas bien parce qu’elle "n’a pas l’habitude de vivre ainsi". "Nous sommes tous traumatisés à cause du tremblement de terre", continue-t-elle. Sans s’attarder plus sur son malheur, elle esquisse un rapide sourire, commence à rire et révèle que venir dans ce salon lui rappelle sa vie d’avant. Les organisations non gouvernementales découragent pourtant vivement les gens de construire toute installation permanente dans ces camps de fortune qui sont censés n’être que temporaires. Julie et Katiana soulignent toutes les deux leur volonté de reconstruire leurs maisons pour pouvoir déménager de ce camp aussi rapidement que possible. "Elle est vraiment courageuse de tenir sa boutique avec les maigres moyens dont elle dispose maintenant", confie Farah, la sœur de Julie à qui elle donne quelquefois un coup de main. Le salon est un vrai succès et Julie gagne entre 20 et 40 dollars par jour. L’installation de son commerce au beau milieu du camp, parmi une poignée d’autres boutiques improvisées, lui a d’ailleurs permis d’attirer de nouvelles clientes.
AFP

Par : Erica Berenstein

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