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Edition du 22 Mai 2010



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Une cérémonie officielle pour les «victimes françaises» en marge du film Hors-la-loi
Indécente concurrence mémorielle !
22 Mai 2010

Objet de polémique depuis plus d’un mois, le long métrage Hors La Loi de Rachid Bouchareb a été projeté hier au festival de Cannes sur fond de manifestation. Si le film traite de la Guerre d’Algérie, les manifestants étaient là pour perpétuer une guerre des mémoires. Arborant de grands drapeaux français, ils étaient près d’un millier, selon la police, à manifester en marge de la projection du film Hors la loi de Rachid Bouchareb au Festival de Cannes. Répondant à l’appel d’un collectif constitué de parlementaires, anciens soldats, pieds noirs, harkis, les manifestants ont déposé une gerbe devant le monument aux morts de la ville de Cannes à la mémoire des «victimes françaises».
L’extrême droite avait promis de parasiter la cérémonie de projection du film Hors la loi de Bouchareb. Elle a pu compter en cela sur l’appui du maire de Cannes, mais également sur la présence du sous-préfet, représentant de l’Etat, qui s’est joint à la manifestation en déposant une gerbe, à la demande du secrétaire d’Etat aux anciens combattants, Hubert Falco en l’honneur des «victimes françaises» de la Guerre d’Algérie et des massacres du 8 Mai 1945. Ce qui donne des airs officiels à la «croisade» promise par l’extrême droite. Et pour ce faire, tous les moyens sont «bons» pour se faire entendre. Quitte à faire dans la concurrence mémorielle. «Une cérémonie du souvenir organisée en hommage aux victimes françaises de la Guerre d’Algérie a été voulue par la municipalité de Cannes afin de marquer (...) son attachement à la mémoire de nos compatriotes civils et militaires», écrit la mairie de Cannes. Et de poursuivre : «A cette occasion, la municipalité entend manifester son soutien et sa solidarité à l’égard des anciens d’Algérie, blessés et offensés par l’altération des événements ayant inspiré la fiction du film Hors-la-loi. La décision d’organiser une cérémonie commémorative a été prise il y a deux  semaines, au vu de l’émotion suscitée, avant même sa projection, par le film de Rachid Bouchareb Hors-la-loi, en compétition officielle, sous pavillon algérien, au Festival international du film», ajoute Bertand Brochand, maire UMP de Cannes.
Si les détracteurs arguent que le film est antifrançais, ce qui les gêne en réalité c’est que le film va à l’encontre du mythe de la gloire coloniale érigée en valeur républicaine en France. Rappelons que douze intellectuels avaient signé une déclaration commune condamnant «un retour en force vers la bonne conscience coloniale» tandis que la Ligue française des droits de l’Homme avait dénoncé les tentatives de «pressions» qui s’apparentent à une «censure des œuvres ayant trait à la Guerre d’Algérie» qui dérogeraient à la «vérité officielle».

Bouchareb : «L’abcès est crevé, maintenant débattons !»
Après Lionel Luca, qui a allumé la mèche de la polémique autour du film de Bouchareb l’accusant de vouloir «falsifier l’histoire», le maire de Cannes est la deuxième personnalité du parti de Sarkozy à partir en guerre contre ce film sélectionné au Festival de Cannes sous pavillon algérien. A ce niveau, ce n’est plus une position de quelques députés UMP «égarés», mais ça a tout l’air d’un consensus exprimé par le parti de Sarkozy. Du moins, si les détracteurs n’ont pas été rappelés à l’ordre, cela voudrait dire qu’il s’agit d’une position défendue par le parti de Sarkozy. La démarche belliqueuses de ces «ultras» va-t-en guerre, qui utilisent cette énième polémique pour continuer la Guerre d’Algérie, a été dénoncée récemment par le député du parti socialiste, Arnaud Montebourg. Si les détracteurs du film l’accusent d’être pro-FLN, ce n’est pourtant pas un sentiment partagé par le ministre de la Culture, Fréderic Mitterand qui juge le film équilibré.
De son côté, le réalisateur Rachid Bouchareb a indiqué, au cours d’une conférence de presse après la projection de son film : «Maintenant que l’abcès est crevé, nous pouvons débattre dans la sérénité, cela pourrait aider à avancer dans le débat du passé colonial de la France», a-t-il soutenu.

Par : Mounir Cheriffa

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