Entre 1974 et 2006, le football évolue; le jeu se durcit et devient plus défensif, les moyennes de buts marqués lors des coupes du monde fléchissent, mais les nations dominatrices restent les mêmes:
le Brésil, l’Italie, l’Allemagne
et l’Argentine (deux victoires)
et la France (une).
1974 (en Allemagne)
L’Allemagne mate Cruyff
En 1974, l’équipe qui fait rêver le monde entier, c’est l’armée orange des Pays-Bas, promoteur du football total de l’Ajax Amsterdam, conduite par Johan Cruyff, idole des romantiques du football et icône cheveux longs-pattes d’éph’. La Fifa a innové en organisant deux poules pour le deuxième tour, et les Pays-Bas survolent la leur, passant un 4-0 à l’Argentine et un 2-0 au Brésil. Ils retrouvent en finale l’Allemagne de l’Ouest, le pays organisateur, qui a peiné pour en arriver là. Il a fallu subir l’humiliation d’une défaite au premier tour contre le voisin, la RDA (0-1), et en passer par des disputes internes entre partisans d’Overath (Möchengladbach) et deux de Beckenbauer (Bayern), les leaders des deux grands rivaux de l’époque en Bundesliga. Mais les Orange, qui ont ouvert la marque dès la première minute de la finale sur penalty, perdent finalement 2-1. Dans ce tournoi, la plaisante équipe de
Pologne, emmenée par Gzregorz Lato, meilleur buteur du tournoi (7 buts), termine 3e, et le Zaïre bon dernier avec trois raclées (2-0, 9-0 et 3-0).
1978 (en Argentine)
L’Argentine, malgré le bruit de bottes
L’Argentine du dictateur Videla organise sa première Coupe du monde, malgré les demandes de boycottage venues du monde entier... et la remporte pour la première fois, sous un déluge de papelitos descendu des tribunes. Mario Kempès, double buteur pendant la finale remportée contre les Pays-Bas (3-1 a.p.), est le héros des Argentins. Il termine même meilleur buteur (6 buts), après un début de tournoi au ralenti. Les Néerlandais perdent une seconde finale de rang, cette fois sans Johan Cruyff, resté à la maison: il est fâché avec d’autres cadres de la sélection mais prétend qu’il boycotte le Mondial de la dictature. L’Argentine est un beau champion, mais son succès 6-1 (alors q’il fallait quatre buts d’écart) contre le Pérou en poule d’accès à la finale fait jaser.
1982 (en Espagne)
Victoire à l’Italienne
Le grand favori du Mundial est - comme souvent - le Brésil, emmené par les géniaux Socrates et Zico et dirigés par l’esthète Tele Santana. C’est pourtant l’Italie qui va s’imposer, après s’être qualifiée en ne devançant qu’à la différence de but le novice Cameroun. Au deuxième tour, l’Italie bat l’Argentine (2-1) puis surprend le Brésil (3-2), dominateur mais trop peu réaliste, grâce à un triplé de Paolo Rossi. Galvanisée par ce succès, l’Italie ne lâche plus. Elle achève en finale une RFA épuisée par sa demi-finale contre la France (3-3, 4-3 aux t.a.b.), pour la première séance de tirs au but de l’histoire de la Coupe du monde. Le Mundial a aussi été marqué par le brillant parcours de l’Algérie (l’Afrique avait deux représentants pour la première fois), éliminée sur un +arrangement+ entre l’Autriche et l’Allemagne qui se qualifient toutes les deux après une victoire nécessaire et suffisante de la RFA (1-0) lors du dernier match de poule. Et par le piètre résultat de l’hôte espagnol, qui ne gagne qu’un match sur cinq et n’atteint pas le dernier carré.
1986 (au Mexique)
Le sacre de Maradona
Jamais sans doute un joueur n’a à ce point survolé seul une Coupe du monde. Diego Maradona, touché par la grâce, emmène l’Argentine à sa deuxième victoire finale. Il a tout fait: au premier tour, il ronronne mais réussit un premier but contre l’Italie, en 8e de finale, il résiste à la défense la plus rugueuse de 1986, l’Uruguay, et en quart de finale, personne n’a oublié ses deux buts face à l’Angleterre... Le premier volé, de la +main de Dieu+, et le second génial, tout en dribbles au milieu de la défense anglaise. En demi-finale, il bat la surprenante Belgique (2-0) d’un nouveau doublé et en finale, surveillé comme l’ennemi public numéro 1 par la charnière Brehme-Foerster, il ne parvient à s’échapper qu’une fois... pour offrir le but de la victoire (3-2 contre l’Allemagne) à Burruchaga. Il a tout réussi, et éclipsé le magnifique France-Brésil (1-1, 4 t.a.b à 3) en quart de finale.
1990 (en Italie)
La revanche de l’Allemagne unifiée
Moins d’un an après la chute du Mur, c’est une Allemagne unifiée qui se présente en Italie et décroche, enfin après deux finales perdues en 1982 et 1986, une troisième Coupe du monde. Elle prend sa revanche sur l’Argentine (1-0) dans la première finale de l’histoire où l’une des deux équipes ne marque pas. Symbole d’un Mondial où le foot défensif s’est imposé. Maradona, en pleurs après la finale, n’est pas passé loin d’une deuxième couronne. Mais l’autre héros est le Cameroun, première équipe africaine à atteindre les quarts de finale, emmenée par son increvable buteur de 38 ans, Roger Milla (4 buts). Battus par l’Angleterre (2-3 a.p.), les Lions Indomptables quittent la Coupe du monde après un tour d’honneur.
1994 (aux Etats-Unis)
Le Brésil au bout de l’ennui
La Coupe du monde découvre les Etats-Unis, mais ce voyage au pays du soccer n’est pas vraiment fructueux. Seuls les matches Roumanie-Argentine (8e de finale, 3-2) et Roumanie-Suède (quarts de finale, 2-2 a.p., 5-4 aux t.a.b.) ont été vraiment spectaculaires. La finale Brésil-Italie fut à l’image de ce Mondial, un triste (0-0) joué aux tirs au but, lorsque Roberto Baggio, l’homme au catogan, envoie sa tentative dans les nuages. Son talent avait pourtant conduit l’Italie jusqu’au dernier match... On peut aussi retenir le choc Eire-Italie (1-0) à New-York, devant les milliers d’immigrés venus des deux pays dans la Grosse Pomme depuis le milieu du 19e siècle, ou le parcours de la Bulgarie, demi-finaliste pour la première fois de son histoire avec la génération Stoitchkov-Letchi-Ivanov, ou encore le dernier but de Millau en Coupe du monde, à 42 ans! Grosse ombre au tableau: le contrôle antidopage positif (éphédrine) subi par Diego Maradona, en fin de carrière et embarqué sur un très mauvaise pente.
1998 (en France)
Le jour de gloire de la France
La France finit par remporter le trophée suprême, après trois échecs en demi-finale (1958, 1982, 1986). L’équipe de Zinédine Zidane termine en apothéose en écrasant (3-0) en finale le maître de ce jeu, le Brésil, sur un doublé de la tête de son numéro 10.
La France a vaincu de toutes les manières possibles pour arriver jusqu’à la finale, passant au but en or contre le Paraguay en 8e de finale (1-0 b.e.o.), les tirs au but contre l’Italie (0-0, 4-3) en quart et gagnant sa demi-finale contre la Croatie grâce à un doublé de son défenseur Lilian Thuram, ses deux seuls buts en... 142 sélections.
La Croatie, indépendante depuis 1991 et qui participait à sa première Coupe du monde, est la grande surprise du premier Mondial à 32 équipes, qu’elle termine à la 3e place avec le meilleur buteur du tournoi, Davor Suker (6 buts).
2002 (au Japon et en Corée du Sud)
Brésil, cinquième
Guidée par Ronaldo, intenable avec ses huit buts (meilleur buteur), la Seleçao décroche la penta (la cinquième) tant attendue. Les Brésiliens n’ont pas survolé le premier Mondial organisé conjointement par deux pays, comme la grande équipe de 1970, mais n’ont pas tremblé non plus. Avec Rivaldo, le capitaine Cafu ou Roberto Carlos, le Brésil du «Fénomeno gagne ses sept matches dans le temps réglementaire, se faisant un peu peur contre la Belgique, dominatrice en 8e avant de craquer (2-0).
Les Brésiliens ont gagné (2-0) contre l’Allemagne la finale entre les deux nations les plus titrées. La grande surprise du Mondial est la Corée du Sud, premier pays asiatique à atteindre les demi-finales. L’arbitrage en 8e contre l’Italie (2-1 b.e.o.) et l’Espagne en quarts (0-0, 5-3 aux t.a.b.) a prêté le flanc à la critique, mais le succès populaire des Diables Rouges a dynamisé le tournoi. Les Japonais, eux, n’ont fini que 8e de finaliste.
2006 (en Allemagne) L’Italie est éternelle
L’Italie a remporté sa quatrième Coupe du monde en Allemagne, se vengeant de sa séance de tirs au but maudite de la finale de 1994 en infligeant le même sort à la France (1-1, 5 t.a.b. à 3). Le match a été marqué par le coup de tête de Zidane à Materazzi, qui a fait plusieurs fois le tour du monde et alimenté les débats pendant de longs mois. Pour en arriver là, l’Italie a dominé l’Allemagne (2-0 a.p.) dans une nouvelle demi-finale d’anthologie entre les deux pays, comme en 1970 (4-3 a.p. pour l’Italie).
Le tournoi est aussi marqué par le parcours du Portugal de Cristiano Ronaldo, demi-finaliste pour la seconde fois après 1966, et par le match quasi parfait de Zidane en quart de finale contre le Brésil (victoire de la France 1-0), véritable Nijinski au milieu de la défense des champions du monde.
AFP