L’Université Blaise-Pascal (Centre d’études sur les littératures et la sociopoétique), en partenariat avec l’Université de Regensburg, rend hommage à l’écrivain Kateb Yacine. L’écrivain emblématique, auteur de «Nedjma», grand roman lié en 1956 à la fondation de la nation, se voit consacrer un colloque international sous le thème «Kateb Yacine, le migrant». Le colloque, qui sera ouvert au public, se déroulera du 27 au 29 avril à la Maison des sciences de l’Homme.
Le colloque réunira des scientifiques venus de divers horizons (Allemagne, Algérie, France) dans le but d’aborder la thématique de la migration dans les œuvres et la vie de Kateb Yacine : homme du vaste monde, l’écrivain a mené une vie d’errance qui a nourri son œuvre; les étapes de ses périples sont, parmi d’autres, Milan, Tunis, Bruxelles, Hambourg, Bonn, Stockholm, Monterosso, Trieste, Zagreb, Berlin, Florence, Paris... Sa vie et de son œuvre témoignent d’un esprit cosmopolite et engagé. À son combat contre la colonisation s’adjoint une conception de la poésie comme révolution, tant au sens politique que géographique.
Les acteurs de ce colloque sont, d’une part, des spécialistes sur la question de la migration et de Kateb Yacine, comme Benamar Mediene, universitaire, ami et biographe de Kateb ou encore le chercheur Ismaïl Abdoun (Université d’Alger) autour du thème «Pour une poétique nomade : l’exemple de l’écriture katébienne - dans Nedjma et Le Polygone étoilé».
D’autre part, une séance permettra de recueillir les témoignages de la sœur et du fils du grand écrivain, Fadila Kateb et Hans Jordan mercredi prochain. Un spectacle de «Lectures migrantes» autour de Kateb Yacine sera donné le mardi 27 avril à 20 h au Salon de l’Hôtel de ville en partenariat avec la Mairie de Clermont-Ferrand, le service Universités Culture, le théâtre du Pélican (dans le cadre des Journées de l’Afrique de la Mission des Relations internationales de Clermont-Ferrand et des évènements L’Ailleurs dans un miroir), et les Journées de l’Afrique. La vie et l’œuvre de Kateb Yacine sont parcourus par la dynamique de la migration. Dans toute l’œuvre du poète, romancier et dramaturge, l’errance se mêle à l’écriture, comme les deux faces d’un même être-au-monde. À l’instar de ses héros – on pense aux Carnets et au journal de Mustapha dans Nedjma -, la migration nourrit l’écriture de Carnets et de notes semées au vent qui ne seront jamais publiés. Elle devient le corollaire inextinguible d’une création qui s’adonne au monde, y compris dans une perception linguistique historiquement polyglotte.
C’est en s’intéressant à ce mouvement oscillatoire permanent qu’on tentera de retracer la place de ces migrations divergentes multiples et leurs fonctions dans la conception de l’œuvre générée au cœur de ce flux migratoire : par quelles mises en abyme la création représente-t-elle la scène du monde ? En quoi est-elle exploration sismographique de ses révolutions, au sens tant politique que dynamique du terme ? Quelles sont les projections réelles ou imaginaires de ce schème dynamique dans l’œuvre ? Quels en sont les repères topographiques, les figures, les mythes de fondation qui tendent à définir une poétique romanesque de la migration ?
Dans cette exploration spatiale, et sans doute temporelle, on aura soin de situer l’œuvre de Kateb Yacine dans le champ des études contemporaines sur la migration et l’exil (Pierre Bourdieu, Jacques Derrida, Jean-Marc Moura, Monique Lebrun, Simon Harel, Christine Albert, Patrick Chamoiseau…), en confrontant les représentations imaginaires présentes à la pensée de la nation et du nationalisme, mais aussi du métissage, du multiculturalisme et de l’interculturel, du cosmopolitisme et de l’universalité.