«Le roi Lear», ce chef-d’œuvre de la littérature mondiale ne cesse, depuis le XVIIe siècle, de faire le tour du monde. Traduite, adaptée au cinéma et pour différents théâtres, source d’inspiration pour la poésie et la musique, cette pièce intemporelle a fait escale, durant trois jours, à la grande salle Mustapha-Kateb du Théâtre national algérien Mahieddine-Bachtarzi, à travers la nouvelle adapta tion "Les filles de Lear", mise en scène par Sid Ahmed Kara.
Ce drame humain, qui ne cesse de perdurer et qui est, sans aucun doute, la raison de sa longévité pousse les spectateurs, amoureux du 4e art, à se déplacer pour découvrir la nouvelle vision d’un metteur en scène. Mais la question qu’il faudra se poser est de savoir si Sid Ahmed Kara a bien réussi à adapter cette pièce au contexte de notre époque ? Quel est l’objectif de cette adaptation ? De l’algérianiser ? De lui donner un nouveau souffle ?
Bref, de toutes les manières aucun véritable changement n’est perceptible dans l’intrigue de la pièce, sauf bien entendu au niveau du titre.
Le personnage principal de cette pièce, Lear, a suscité l’intérêt des contemporains de Shakespeare qui croyaient que Lear, roi de Bretagne, était véritablement un personnage historique. Alors que ce n’est évidemment pas le cas puisque l’auteur lui-même explique que les intérêts de la tragédie ne sont pas les événements historiques, mais que la pièce est profondément construite à partir d’une structure semblable à celle d’une chronique.
L’histoire générale de cette pièce tourne autour du Roi Lear et ses filles. Le Roi veut partager son royaume entre ses trois filles en leur demandant, en échange, de lui exprimer leur amour. Goneril et Regan s’empressent de faire ses louanges, de façon quelque peu outrée, mais Cordelia se refuse à rivaliser avec la rhétorique de ses sœurs, par peur de dénaturer le véritable amour qu’elle porte à son père. Celui-ci la déshérite, et elle épouse le Roi de France.
N’en déplaise aux lecteurs, le but ici n’est pas de résumer la pièce, mais de voir son essence et son fil conducteur.
Car tel que le voulait son auteur, le but de cette pièce est, certes, de monter une véritable tragédie familiale, mais également de voir l’évolution d’un personnage, Lear, qui, faut-il le souligner, a été soigneusement élaboré par Shakespeare. Chose qui a été respectée par Sid Ahmed Kara.
En quelque sorte, nous pouvons qualifier cette pièce de didactique car plusieurs valeurs ont été abordées tel que la patience et le fait de reconnaitre ses erreurs. Ce dernier point, nous le percevons chez Lear qui commence à comprendre ses propres fautes, notamment celles commises à l’égard de ses enfants.
A travers cette pièce, un sentiment de pessimisme, voire de nihilisme nous envahit. Et c’est ce mélange entre méchanceté et folie, entre pouvoir et impuissance qui en a fait justement l’une des plus intéressantes de notre époque. Le jugement de Ben Jonson, auteur contemporain et rival de Shakespeare, s’est, en effet, vérifié : Shakespeare n’appartient pas à une époque, il est de toutes les époques.
D’ailleurs, cette pièce a été très souvent adaptée au théâtre et au cinéma et les comédiens les plus célèbres ont incarné le rôle de Lear. Cette tragédie a également été source d’inspiration pour de nombreux compositeurs.