Il devait faire de la grande oasis méditerranéenne, le paradis des Dieux. Depuis tant de siècles qu’il voit se déchirer les civilisations, le vieil arbre ne se lassera-t-il pas un jour de répandre ses bienfaits sur une terre de malheur. Ses rameaux argentés, usés de symboliser ce qui ne vient jamais, pourraient bien finir par ne plus donner des fruits. A quoi bon avoir près sous son ombre Homère et Cervantès, les scribes d’Alexandrie, les prophètes de la Bible, le Saint Coran béni par Mohamed (QSSSL), dernier messager de Dieu, l’illustre cortège de la pensée islamique, la science phénicienne, si l’homme ne fait pas usage de cette masse de sagesse ? A quoi bon avoir abrité les méditations d’Abraham, des Prophètes Jésus et Mohamed, d’Avienne, d’Averroès, de Saint Augustin, de Pétrarque et Dante pour en arriver là ? L’olivier nous a tout donné : culte de la vie et l’amour des saveurs, l’or de ses perles noires et le parfum du ciel. Ses racines ont porté la naissance de nos philosophes, bercé nos religions. Il est notre mémoire. Pourtant, les berges de la Grande Bleue se teintent encore de rouge. Sur trois continents, des monts de Galilée aux plaines d’Andalousie, des valus de l’Atlas, des montagnes de l’Ouarsenis, du Zaccar et du Djurdjura, des châteaux de Sicile aux Garrigues de Provence, des méandres du Tigre à l’embouchure du Tage, le monde de l’huile d’olive devrait baigner dans le bonheur. De Bourached aux Arribs, en passant par Ben Alle Bouhoud, chez les Bani Farh, Bani Menaceur et Bani Ghomeriane, s’étalent à perte de vue des champs d’oliviers. Comme chaque année, les habitants de ces régions célèbrent la cueillette par des fêtes qui durent tout le mois de décembre. Femmes et hommes sont mobilisés et la touiza renforce l’esprit de solidarité surtout en fin de journée autour d’un grand plat de couscous. Pour les invités, on offre des galettes au miel et du raisin. Dans les régions oléicoles en Kabylie, la cueillette des olives est synonyme de toute une cérémonie et c’est l’Omem du village qui donne le signal du gaulage et la touisa se déplace pour chaque oliveraie. Le soir, dans chaque dechra, c’est la fête : repas, friandises et chants en l’honneur de l’arbre béni. Oliveraies millénaires, chaque essence décline son identité avec un nom charmant : "Cornicabras" andalouse, "Kalamata" grecque, "Picholine" provençale "arbequina" catalane "Chemlal et azaradj " à Tizi-Ouzou, la région du Zaccar et les monts de Skikda. "C’est un arbre invaincu qui renaît de lui-même", disait le grand philosophe Sophocle. Plusieurs facteurs déterminent la qualité de l’huile d’olive : son humidité, sa teneur en huile et son acidité. La variété d’olives génère des caractères différents d’une huile à l’autre. Ainsi, l’huile de Toscane et du Péloponnèse présente des notes végétales aux aromes d’artichaut ou de poivrons.
Tandis que celle d’Andalousie et de Sardaigne exprime des notes plus fraîches tirant sur l’amende ou les agrumes. Cette année, la récolte a été satisfaisante. Le directeur de l’agriculture nous signale : "La récolte est évoluée à 70 mille qx et la production de l’huile d’olive a atteint 32.100 litres. Nous avons mis sur pied un vaste plan de rénovation pour le développement de l’oléiculture avec la plantation de 15 mille plants sur une superficie de 1.500 hectares à travers les zones de montagnes." Enfin, dans notre pays, l’olivier compte 23 dénomination sur les 35 isustants, mais les plus avertis préfèrent de loin trois variétés : Chemlal, Dahbia et Azeradj.
C. E. M.