Le Midi Libre - La 2 - La Seine se souvient
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Edition du 16 Octobre 2008



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17 octobre à Paris
La Seine se souvient
16 Octobre 2008

Si la Seine pouvait parler, elle donnerait sa version des faits. En cette nuit du 17 octobre 1961, des dizaines d’Algériens ont été jetés dans le fleuve qui traverse Paris.
La guerre de Libération fait rage en Algérie, depuis novembre 1954. La cause algérienne est discutée à l’ONU, et l’Etat français lui-même entame des négociations, qui déboucheront sur les accords d’Evian, et sur l’indépendance du pays. Le cessez-le feu sera décrété le 19 mars 1962, dans à peine 5 mois. Mais les Algériens ont été obligés de transporter la guerre en pleine capitale française. Au total, 22 policiers français tombent dans les attentats organisés par la résistance, à Paris même. Ce ne sont que des coups rendus à une police qui n’hésite pas à faire usage de ses armes contre des citoyens désarmés, à pratiquer la torture dans les centres de détention, à multiplier les contrôles et les fouilles sur la population algérienne de France.
Le sinistre préfet de police, Maurice Papon, dirige lui-même les opérations de répression. L’Institut médico-légal de Paris a dénombré 54 cadavres de Maghrébins entre le 1er et le 16 octobre 1961. Un couvre-feu a été décrété entre 22 heures 30 et 5 heures 30 du matin, pour tous les « Musulmans français d’Algérie », doux euphémisme.
Pour dénoncer une telle injustice, le FLN appelle à une manifestation pacifique dans les rues de Paris pendant le couvre-feu. Des centaines de milliers d’Algériens, de tous âges, n’hésitent pas à braver l’interdiction de manifester. Le service d’ordre du FLN procède à la fouille des manifestants pour vérifier qu’il n’y a pas d’arme dissimulée.
Mais une répression féroce va s’abattre sur les manifestations. Des dizaines d’Algériens sont jetés dans la Seine, alors que d’autres périssent dans les centres de détention. Des témoins rapportent; dans de nombreux quartiers de Paris, des scènes d’exécution à l’arme à feu, on a également décrit des mutilations à l’arme blanche et des entassements de cadavres. Au cours de la nuit, la police lancera des « ratonnades » dans le bidonville de Nanterre (département de la Seine). Un journaliste américain parlera d’une « Saint-Barthélémy moderne ». Des policiers évoqueront aussi un « massacre » dans la cour de la préfecture.
Pour toutes ces raisons, le 17 Octobre restera comme l’une des dates clefs de la lutte des Algériens pour l’indépendance de leur pays. Pendant longtemps, ces faits seront niés par l’Etat français. Les langues ne commencent à se délier qu’à partir des années 70, mais surtout à partir du procès qui opposera Maurice Papon à un historien en 1999. Ce procès retentissant mettra surtout l’accent sur le passé vichyste de Maurice Papon, mais des actes barbares liés à la date du 17 octobre remonteront à la surface. On ne peut pas éternellement cacher le soleil avec un tamis, n’est-ce pas ?
Tout comme les manifestations du 11 Décembre à Alger et dans d’autres villes d’Algérie, les manifestations du 17 Octobre, et la répression féroce à la quelle elles furent soumises sont un témoignage vivant de l’attachement des Algériens, où qu’ils se trouvent, à la liberté et à l’indépendance de leur pays.
La Fédération de France du FLN a été une organisation dynamique, formée de militants aguerris. L’émigration était structurée. Les émigrés remettaient des cotisations aux militants du FLN. Beaucoup de jeunes Algériens rejoindront les rangs du FLN soit en Tunisie, soit au Maroc, pour fuir la répression ou l’enrôlement dans les rangs de l’armée française.
r. M.

Par : Rachid Mechtras

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